Portrait #1 : Viviane !
- CamilleEtPaul
- 31 mai 2019
- 6 min de lecture
Qui sont les gens que l’on côtoie au quotidien ? A quoi aspirent-ils ? D’où viennent-ils ? Echanges avec notre entourage ivoirien : de nos co-volontaires à nos voisins en passant par nos collègues, nous vous partageons quelques rencontres marquantes de notre vie à Bouaké.
Et on commence par… une blanche ! Et oui, moins exotique que vous l’espériez peut-être mais exotique, elle l’est quand même ne vous inquiétez pas. Viviane a accepté de se prêter au jeu la première.

Présentation
Viviane c’est un rayon de soleil, une petite boule d’énergie et de sourires qui fait du bien. Et pourtant, elle en a vu des vertes et des pas mûres dans sa mission. Nous avions partagé le stage de 10 jours de formation avec elle, mais elle est partie en volontariat bien avant nous : installée à Bouaké en août 2018, pour un an. Elle part avec tout son dynamisme et sa bonne humeur comme éducatrice dans un orphelinat. Particularité de sa mission par rapport à nous – et pas des moindres ! -, elle VIT sur son lieu de mission. Elle habite dans l’orphelinat, partage ses repas avec les enfants dont elle s’occupe, partage la vie de tous les jours avec les mamans qui s’occupent des aspects « pratiques » du quotidien (repas, linge, bébé…) ainsi qu’avec sa responsable, la directrice de l’orphelinat. Enfin non, elle y vit en semaine en fait, parce que depuis janvier environ les week-ends et les jours de maladie, elle vient habiter chez nous afin de faire une coupure. Viviane est donc notre joyeuse colocataire partielle, à tel point que la chambre d’amis a été baptisée « Chambre de Viviane ».
Alors Vivi, d’où viens-tu ?
« Je suis née en Alsace. J’ai grandi à Nîmes et à la Réunion. » Mais son cœur, c’est bien à la Réunion qu’il est installé ! Elle en a le goût du piment, la technique pour couper l’ananas, l’habitude des grosses chaleurs et le sourire au naturel. Et une certaine habitude, bien installée dans ce côté-ci du monde, à être très (très très) flexible avec les horaires…
Que fais-tu dans la vie ?
« Je suis éducatrice » et pas des moindres en ce moment, éducatrice de pas moins de 25 enfants de 0 à 25 ans, au quotidien, 24h/24 !
Qu’est-ce que tu aimes manger ?
« Les crêpes. Et les fruits. Et le chocolat. Crêpes – fruits – chocolat, la base. » Heureusement, Paul est passé maître dans la réalisation des crêpes avec les ingrédients locaux (particulièrement le lait en poudre, pas facile à maîtriser dans les recettes !)…
Et ce que tu n’aimes pas manger ?
« La coriandre et les poivrons crus. Les poivrons tout court même. »
La Côte d’Ivoire
Qu’est-ce que tu aimes en Côte d’Ivoire ?
« J’aime mes enfants. C’est avec eux que je vis, que je partage tout. J’aime les bières avec les potes dans les maquis, avec attiéké-poulet braisé. J’aime les moto-taxis, c’est trop pratique. J’aime la musique, j’aime l’ambiance. J’aime le foutou igname avec sauce arachide. J’aime que les gens se lèvent et dansent quand ils veulent, y a pas de règle, de lieu ou de moment pour ça, ils dansent c’est tout. Et j’aime le bordel de la route. » Et effectivement, la route c’est le bordel mais Viviane, qui gère une partie des conduites de ses enfants, est à l’aise. « Y pas de problème » comme les ivoiriens disent.

Et, tu la vois venir celle-là, qu’est-ce que tu n’aimes pas en Côte d’Ivoire ?
« Alors, on commence par quoi… ? [rires] [réflexion] J’aime pas que la forme soit plus importante que le fond. La forme, l’apparence, le m’as-tu-vu quoi. J’aime pas toutes les procédures qu’il faut faire, pour tout : pour les papiers, pour rentrer en contact avec quelqu’un… Ça pourrait être un jeu, socialement, mais je trouve que ça enlève le côté naturel en fait, ça me saoule. » Socialement, en effet, il ne faut pas faire n’importe quoi. Quand on va chez quelqu’un ou dans un village, quand on reçoit quelqu’un il y a des protocoles à suivre. La base étant 1.On offre à boire, 2.On demande les nouvelles et 3.La personne répond « Y a rien de grave » et explique pourquoi elle est là (ce qui peut être juste « je viens dire bonjour »). A cela se rajoute des subtilités plus complexes si on va dans les villages, si ça parle baoulé, s’il y a des personnalités officielles dans le groupe etc.
« Ah et j’aime pas quand mes enfants se battent, se tapent dessus, ce qui arrivait souvent. Maintenant quasiment plus, ouf ! »
Pourquoi le volontariat ?
« Je sais pas trop. Je sais pas d’où c’est parti. Je savais au fond qu’après mes études, c’était volontariat. C’était un bon moyen d’allier mes compétences d’éducatrice et de voyager, découvrir d’autres cultures. Ça me convenait bien – et ça me convient toujours. Je me vois bien repartir un jour, pas tout de suite, mais un jour. »
Tu peux me raconter ta mission et la vie ici en quelques mots ?
« Arf. La mission, je dirais : des hauts et des bas, très intenses et très forts, autant les hauts que les bas. Très riche. Je me suis pas ennuyée. » Il faut savoir que parmi les volontaires de Côte d’Ivoire (une dizaine cette année), nous sommes d’accord pour dire que la mission de Viviane fait partie des plus difficiles à vivre au quotidien. Heureusement, elle aime ce qu’elle fait, elle aime les enfants avec qui elle vit et elle possède une joie naturelle qui l’aide énormément, mais le fait de n’avoir aucune réelle pause et de travailler seule sur un an peut être complexe. En ajoutant à cela les relations interculturelles qui ne sont pas toujours faciles, particulièrement avec la hiérarchie, le quotidien peut devenir très lourd à vivre.
« La vie : un peu frustrée. C’est ce qui m’a manqué, d’avoir plus de temps à l’extérieur, pour être avec les gens, découvrir. Je m’attendais pas à ce que ce soit si difficile d’avoir une vie sociale, pour moi ça allait être naturel de rencontrer des gens, j’ai l’impression d’en avoir été empêchée [par la mission]. Mais sinon très chouette, et puis quand on les connaît, les ivoiriens sont trop gentils. » Et la gentillesse des ivoiriens, elle connaît bien Viviane. Son naturel enjoué et son contact facile lui ouvre des portes et de nombreuses opportunités ! Dès qu’il y a un bon plan de repas, d’activité offerte ou autre, elle est embarquée (et se laisse embarquer avec plaisir !).
La vie, les projets, les envies…
Qu’est-ce qui est important pour toi dans la vie ?
« Ah ouai. Comme ça là, tu me demandes ça ! [rires] … Faire le beau et le bien autour de soi, profiter de la vie, faire du positif, partager, échange, découvrir… Des jolis mots comme ça [rires]. Vivre le moment présent. Carpe Diem. C’est bien ça. »
Ta plus grande tristesse ?
« Ça c’est facile [à identifier] : perdre un être cher. »
C’est quoi ton plus grand rêve ?
« Ah. Pfff c’est dur ! Euh non j’ai pas un grand rêve, plutôt plein de petits. Avoir une cabane dans un arbre... Faire de la montgolfière et du parachute… Avoir un chien… Apprendre plein de trucs… Faire le tour du monde sur une licorne, mais ça va pas être facile ça (Rire). Faire du violoncelle et de la guitare… Voyager, découvrir, apprendre, profiter de la vie quoi. Toujours vivre le présent, même vieille aha »
Quels sont tes projets à venir ?
« En rentrant ? Ah non à long terme ? Profiter des amis et de la famille. Bosser quelques temps en tant qu’éduc’, reprendre des études et puis voyager, repartir en volontariat. Avoir des nouveaux projets. Toujours de nouveaux projets !»
Et pour finir, si tu devais partir sur une île, seule, pour toujours et que tu ne pouvais prendre que trois objets ?
« Une île genre mais y a quoi dessus ? Une île déserte ? » Sur l’île y a la forêt, la mer, les montagnes et c’est tout. « [Réflexion intense] Pour manger, je trouverai sur place. Pour faire un jeu ou un instrument je fabriquerai sur place… [Encore des réflexions intenses] Ben rien. Je prendrai rien, parce que je pourrais fabriquer ce dont j’ai besoin et que j’ai pas le droit de ramener des gens avec moi. »
Viviane, 23 ans, la voix de la sagesse.

Et pour conclure cet échange plein de bonne humeur et de simplicité, je prendrai la citation d’un prêtre ivoirien, s’adressant à Viviane : « On voit dans tes yeux que tu es vivante ». C’est bien résumer cette jolie personne qu’est Viviane, un petit rayon de soleil supplémentaire dans notre volontariat !
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