Entre Pâques et Corona #1

Période particulière à travers le monde, nous observons de loin notre France confinée et en panique sanitaire tout en sentant venir la catastrophe chez nous. Comment vit-on cette période étrange ? Comment vit-on Pâques dans ce cadre ?

Point Corona

Alors au 10 avril où j’écris cet article, il y a dans le pays plus de 300 cas de coronavirus avérés et 3 décès. 90% de ces cas sont à Abidjan où s’est créé le 1er gros foyer de contamination en Côte d’Ivoire, mais il y a également quelques cas à travers l’ensemble du pays.

Heureusement, des mesures ont été prises très (très) vite : fermeture des écoles mi-mars, fermeture des restaurants, maquis et autres lieux de divertissement, couvre-feu de 21h à 5h dans tout le pays… La plupart de ces mesures sont appliquées mais évidemment on ne peut pas pour autant fermer toutes les petites boutiques, tous les marchés et toutes les vendeuses de nourriture de rue donc la vie continue dans la rue globalement de manière calme mais toujours animée. Il faut comprendre que pour de nombreux ivoiriens, fermer les marchés/boutiques reviendrait à ne plus pouvoir manger le soir, la situation est donc particulièrement délicate. Vis-à-vis d’une hécatombe sanitaire pour l’instant, on n’en est pas là mais le virus avance doucement tout de même, avec la subtilité qu’on est loin d’avoir un chiffre réel car peu de personnes vont à l’hôpital en 1ère intention et le fait que si crise générale il y a, le système de santé local ne permettra pas d’y répondre (déjà en temps normal il a du mal à répondre…).

Un robinet tel qu'il y en a partout en ville (avant même l'arrivée du virus, il y avait ce genre d'installation dans la plupart des maquis)

De notre côté qu’est-ce que ça donne concrètement ? Nos missions sont très ralenties au quotidien : l’école dans laquelle travaille Célia est fermée, elle est donc au chômage technique. Sully et Paul continuent à travailler partiellement à la maison et vont à l’hôpital psychiatrique quand il y a besoin (le matériel de masque / gants / gel n’y manque pas !).

De mon côté, la Licence d’orthophonie s’est arrêté en présentiel mais nous faisons tout pour continuer à envoyer les cours magistraux aux étudiants, en espérant n’avoir plus que les stages et TD à poser quand les cours reprendront. Certains profs se motivent même pour avoir des échanges en Zoom, mais cela reste limité car tous les étudiants n’ont pas d’ordinateur. Et puis enfin côté consultations, j’ai extrêmement réduit : je ne vais plus dans les lieux de vie tels que la Pouponnière et l’Arche jusqu’à nouvel ordre et j’ai interrompu mes consultations avec l’ensemble de mes patients pour lesquels je ne pouvais assurer un minimum des conditions d’hygiène (enfants qui bavent, mettent tout à la bouche, me sautent dessus…), ce qui concerne environ 90% de ma patientèle.

Nous avons craint pendant quelques temps que le Ministère des Affaires Etrangères (qui nous suit étroitement ç travers l’Ambassade et le Consulat) ne nous impose un rapatriement mais heureusement ce n’est pas à l’ordre du jour pour l’instant.

Confinement ?

Nous ne sommes donc pas légalement confinés mais nous nous auto-confinons par précaution et de toute façon les quelques sorties qui nous étaient possibles et agréables à savoir les soirées au maquis ne sont plus possibles car tout est fermé. Cependant nous vivons fortement le confinement français, et plutôt de manière positive honnêtement : vu que tout le monde est confiné chez soi, les gens sont plus sur les réseaux sociaux, il y a plus d’initiatives d’appels d’amis et de la famille, certains installent Whatsapp pour l’occasion ce qui permet de prendre des nouvelles de gens avec qui c’était plus compliqué depuis 1 an et demi ! Et puis notre auto-confinement n’étant pas strict, il nous permet de continuer à voir nos voisins du Petit Foyer de l’Arche et à partager des temps ensemble.

Et Pâques dans tout ça ? Votre Semaine Sainte ?

Evidemment ici aussi toutes les manifestations religieuses quelles qu’elles soient sont interdites. Pas de possibilité pour nous alors de vivre la semaine sainte au rythme du Monastère Bénédictin avec qui nous vivons chacune de nos messes depuis 1 an maintenant. Mais le confinement français a du bon : notre ancienne paroisse de Rennes, où sont actifs de nombreux amis, propose la plupart des temps forts de cette période en live et nous a même invités à participer de manière active à travers des chants, vidéos, photos etc. Démarche bienvenue pour nous, un peu étrange tout de même car cela nous remet le nez dans une période et des lieux qui étaient déjà loin pour nous qui vivons dans un autre monde mais quel plaisir d’échanger avec tous ces amis, ces frères et sœurs de cœur et en Christ, de revoir ces lieux à distance et surtout de vivre Pâques en communion avec cette paroisse qui nous tant donnés ! La France nous manque, mine de rien !

Et puis, comme tout n’est pas non plus possible à distance, nous prenons le temps d’aller vivre « en chair et en os » cette Semaine Sainte avec le Petit Foyer de l’Arche. Ce n’est pas tout à fait une nouveauté puisqu’il nous arrive déjà de temps en temps de nous joindre à eux pour leur prière quotidienne le soir. Ce sont des temps simples et qui nous touchent profondément à chaque fois par leur simplicité et leur profondeur.

Ainsi ce Jeudi Saint, après avoir suivi la messe en live de la Paroisse Notre-Dame de Bonne Nouvelle à Rennes, nous filons chez nos voisins et amis pour aller vivre ensemble un temps de prière au calme, nous permettant de vivre le lavage des pieds avec notre famille locale.